Le Joseph de l’histoire

Le Joseph de l’histoire

Les évangiles sont l’histoire de notre foi. Même si ce ne sont pas à proprement parler des vérités scientifiques, Jésus est bien le seul « roi » bénéficiant d’une documentation aussi fournie ! Joseph, quant à lui, n’a peut-être pas marqué cette littérature ; il a néanmoins marqué l’Histoire. En apportant un certain nombre de valeurs fondamentales dans notre société et dans son développement.

Joseph le Travailleur. Le charpentier mentionné dans les écritures n’est qu’une traduction approximative, au demeurant très sympathique, du terme grec « tektôn » signifiant ouvrier du bois, menuisier, mais aussi inventeur, créateur, artisan à partir du bois. L’ère chrétienne, par les hommes de la Sainte famille (Jésus et Joseph), marque un tournant décisif dans la relation au travail. Sous forme de respect et de réalisation de soi, non pas du mérite. Cette notion n’apparaît qu’en filigrane dans l’Ancien testament. Ce grand écart entre valeur et peine a donné lieu à des interprétations très variées. Saint Benoît, fondateur de l’ordre des Bénédictins, en a fait une règle de vie, qui prévaut encore aujourd’hui : Ora et labora (prie et travaille).

Joseph le paternel. Courant dans l’orthodoxie, l’aspect protecteur de Joseph a également influencé nos traditions occidentales. Travailleur, fiancé, nourricier et adoptif sont des rôles que Joseph a endossé au cours des siècles. Tardivement les papes ont propulsé Joseph à la tête de l’Eglise comme Saint Patron. Et même comme un modèle pour les prêtres. De même que Joseph s’est vu confié la Vierge et l’enfant, de même les prêtres ont la charge du Dieu vivant, à savoir l’eucharistie. Les bénédictins mentionnés plus haut sont nés courant 6ème siècle alors que le rôle protecteur paraît un peu plus tardif. Ce serait l’influence d’un écrit apocryphe, c’est-à-dire non retenu dans la liste officielle des textes constituant la Bible, du 7ème siècle : l’Histoire de Joseph le Charpentier.

Mais les grandes décisions, les retours sur l’histoire de Joseph et son implication sont plus récents. Joseph voit son culte prendre de l’ampleur à partir du 17ème siècle[1] :

  • en 1621, le pape Grégoire XV élève la fête de saint Joseph le 19 mars au rang de fête d’obligation ;
  • en 1642, le pape Urbain VIII confirme à son tour le rang de cette fête ;
  • en 1661, après l’apparition et le miracle de la source de Cotignac, Mgr Joseph Ondedei, évêque de Fréjus, reconnaît officiellement les apparitions de saint Joseph et en approuve le culte ;
  • cette même année 1661, le roi Louis XIV de France, qui devient père pour la première fois, consacre la France à saint Joseph, chef de la Sainte Famille
  • en 1678, l’empereur Léopold Ier, n’ayant pas de fils de ses deux premiers mariages, prénomme Joseph, le fils que lui donne sa troisième épouse Éléonore de Neubourg (Joseph étant un prénom jusqu’alors inusité dans les Maisons royales) en signe de reconnaissance envers le père nourricier du Christ
  • en 1741, Marie-Thérèse d’Autriche, reine de Bohême et de Hongrie, fille et héritière de l’empereur Charles VI, déjà mère de trois filles et se débattant dans la Guerre de succession d’Autriche, sur les conseils de sa mère, prénomme également son fils Joseph en signe de reconnaissance filiale envers le père nourricier du Christ
  • le 8 décembre 1870, le pape Pie IX déclare officiellement saint Joseph Patron de l’Église universelle, et fait du 19 mars une fête solennelle ; par ailleurs il institue la Solennité de saint Joseph, patron de l’Église universelle, fixée au 3e dimanche après Pâques
  • en 1889, le pape Léon XIII démontre comment saint Joseph est le modèle des pères de famille et des travailleurs, et lui décerne officiellement le titre de « saint patron des pères de famille et des travailleurs », titre que la piété populaire lui avait déjà donné depuis des siècles
  • en 1955, le pape Pie XII reprend le principe de la fête du travail en instituant la mémoire de saint Joseph artisan et en la fixant au 1er mai de chaque année ; saint Joseph est ainsi l’un des saints que l’on fête deux fois dans l’année (19 mars et 1er mai)

En cette période de recherche œcuménique tous azimuts, Joseph est une figure rassembleuse. Toutes les Églises le vénèrent également : orthodoxes, protestants, catholiques, etc. lui vouent la même confiance.

Pierre Moser


[1] Source wikipedia