1er Dimanche de Carême – 29 février-1er mars 2020

1er Dimanche de Carême – 29 février-1er mars 2020

«Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable». C’est bien l’Esprit qui le conduit au désert. Il n’y a donc pas que Jésus et le tentateur, il y a aussi l’Esprit ! Il n’en demeure pas moins que Jésus est vraiment l’un de nous. Comme nous, il est tenté, mis à l’épreuve.
C’est d’abord dans le désert que Jésus est conduit. Lieu de vérité sur soi et de cœur avec Dieu, mais aussi lieu de défi. Dans sa traversée du désert, le peuple n’a cessé de récriminer.

Le tentateur sait qui est Jésus, alors il le provoque: « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. » (Mt 4,3) Fais pour toi-même ce qui peut calmer ta faim. Laisse- toi guider par ta faim et réponds à ce peuple dont tu connais les besoins. Jésus le fera, mais d’une tout autre manière. C’est en partageant les pains et les poissons qu’on lui confie, qu’il nourrit les foules (cf Mt 14,13-21 et Mt 15,32-39).
Mais il sait que notre humanité n’a pas faim que de pain, elle est à la recherche de sens et de plénitude. Nous devenons des vivants en recevant ce qui sort de la bouche de Dieu: le souffle qui fait vivre, la Parole qui nous rend libres.

Alors le diable emmène Jésus à la Ville sainte. C’est là que doit se manifester le Messie. Placé au somment du Temple, le diable le provoque: «Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas » (Mt 4,5-6). Et de citer le psaume 91 que l’on pourrait résumer ainsi: si tu mets ta confiance en Dieu, rien ne peut t’arriver. Alors, si tu es le Fils de Dieu…
C’est bien vers la ville sainte que Jésus ira. Mais ce sera pour y être mis à mort. Pour les disciples -pour nous- c’est un défi: comment mettre notre confiance en celui que l’on a condamné et mis à mort? Ne serions-nous pas plus à l’aise s’il avait étalé sa puissance de manière de manière spectaculaire ?

Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire. Il lui dit: «Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi.» (Mt 4,8-9). Dernière tentative du diable. Il se met cette fois à la place de Dieu et s’approprie la création elle-même. Il se propose de faire de Jésus un puissant, mais selon ses vues et ses projets. La réponse de Jésus est sans appel: «Arrière, Satan !» (Mt 4,10). L’Evangile de Matthieu se terminera bien sur une autre montagne, celle où Jésus avait ordonné à ses disciples de se rendre. C’est là que le ressuscité leur dira : «Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre» (Mt 28,18). Et d’ajouter: «Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde.» (Mt 28,20). Son pouvoir, c’est de Dieu qu’il le tient.
Répondre à ses besoins comme unique dimension de la vie, se servir de Dieu plutôt que le servir, être puissant comme une fin en soi, voilà ce que le tentateur propose à Jésus. Le grand inquisiteur de Dostoïevki le dira à sa manière: «Il n’existe que trois forces, seulement trois forces sur terre qui sont capables de vaincre et pour s’emparer pour toujours de ces rebelles débiles pour leur bonheur. Ces forces, ce sont le miracle, le mystère et l’autorité». Et de reprocher à Jésus de les avoir rejetés.

Mais c’est justement en les rejetant qu’il rend visible le projet de Dieu plus fort que toute séduction. C’est dans la fidélité au Père qu’il se montre entièrement libre. C’est en lui qu’il nous est donné de vivre en plénitude notre humanité et d’être vainqueurs de tout ce qui ne peut que nous déshumaniser.

Marc Passera